Qui peut diriger demain notre entreprise familiale ?

Dans une PME de la plasturgie, la seconde génération dirige l’entreprise depuis plus de 30 ans. Actionnaires majoritaires à eux deux, le frère et la soeur ont dépassé 60 ans. Ils ont décidé qu’il était l’heure de confier la direction opérationnelle à un dirigeant plus jeune. Trois de leurs enfants et neveux travaillent dans l’entreprise. Qu’ils soient diplômés ou autodidactes, ils y sont attachés et occupent des postes permettant d’apprendre le métier et les responsabilités. La famille actionnaire se tourne logiquement vers eux pour la succession. La pression pour que l’un d’entre eux dirige l’entreprise demain est latente. La famille pressent plutôt l’un que l’autre. Mais les échanges sont difficiles, à demi-mot, pour ne pas fragiliser la cohésion familiale . Pour la jeune génération, Julie, Marc et Benjamin, l’heure n’est pas encore venue pour occuper la fonction de direction. Par manque de compétences ou besoin d’expériences, par choix personnels, chacun a ses raisons. Il n’est pas simple pour autant de les exprimer aux parents, entre eux et à la famille qui comptent sur eux.

Mais l’entreprise aura besoin d’un dirigeant et le temps passe. La solution d’un dirigeant extérieur est envisagée. Comment ne pas perdre la main sur la stratégie de l’entreprise ? Comment ne pas décourager ou éloigner la troisième génération ? 

La tentation est forte de rechercher rapidement ce dirigeant en similitude avec le profil des dirigeants actuels. Pour autant, la première étape consiste à clarifier avant tout les enjeux stratégiques des cinq années à venir et donc les compétences requises d’un futur dirigeant. Cette analyse est ensuite partagée avec la troisième génération. Cela permet à Julie, Marc et Benjamin de se projeter ou non plus aisément dans cette stratégie et ses exigences, et d’exprimer en quoi ils ne sont pas prêts à ce jour.

Le scénario du recrutement d’un dirigeant non familial est  alors approfondi. Son âge, entre 52 et 56 ans, devra lui permettre de diriger l’entreprise en autonomie plusieurs années sans être en danger de devoir laisser sa place avant sa fin de carrière quand Julie, Marc ou Benjamin seront prêts. D’ailleurs, son profil devra présenter un second critère : la capacité à former la troisième génération et à accompagner sa prise en main de la direction dans les deux ou trois dernières années de sa mission. Il devra également saisir le fonctionnement d’une gouvernance qui se met en place dans laquelle le partage des informations est toujours un équilibre particulier entre la gestion rationnelle et les liens émotionnels des actionnaires avec l’entreprise. Enfin, quatrième critère, il devra accepter les valeurs des actionnaires familiaux qui guident parfois le sens de leurs décisions. Parmi les candidatures retenues, le futur dirigeant est alors aussi sélectionné par sa capacité et son adhésion à cette double mission de direction de l’entreprise et de transmission du pouvoir.

Pour la troisième génération, la pression retombe. Leurs aspirations professionnelles ne sont plus un tabou. Chacun peut engager une démarche de réflexion sur son projet et ses compétences pour envisager ou non  la perspective d’une direction dans les années à venir. Il en connaît mieux les conditions.

Les instances de gouvernance entrent également en jeu. Un conseil des actionnaires familiaux doit s’habituer à soutenir et surveiller la direction opérationnelle sans s’immiscer dans la gestion, à parler stratégie sans décider sa mise en œuvre réelle. La troisième génération doit-elle être présente à ce conseil ? Il n’y a pas de réponse standard. Les deux cas de figures peuvent fonctionner avec succès. C’est tout l’art du sur-mesure de la gouvernance. Parallèlement, l’habitude sera prise de faire un point collectif régulier, minimum annuel, informel, avec Julie, Marc et Benjamin, sur leurs  parcours professionnels.

Les dimensions familiales et une compétence externe sont ainsi conjugués pour assurer la direction de l’entreprise dans les  années à venir.

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