Quelles attentes exprimer aux nouvelles générations ?

Benoît, 32 ans, se sent aujourd’hui éloigné de l’entreprise familiale, et a même eu l’impression d’être « mis à l’écart » par son père. Il a poursuivi seul sa carrière avec succès. Il regrette parfois cet éloignement, même s’il est fier de s’être « construit un prénom plutôt qu’avoir seulement hérité d’un nom ». Son père, lui, aurait voulu transmettre l’entreprise à Benoît, mais il a souhaité lui laisser de l’espace, sans lui infliger de pression familiale. Il a voulu protéger son fils de celle dont il a souffert étant jeune.

Aline a 23 ans, il ne lui reste « plus qu’une année d’études », ce qu’elle vit comme la fin de sa liberté individuelle. Elle sait qu’on l’attend dans l’entreprise familiale, son poste est déjà créé, sa voiture de fonction est au garage, son appartement a été acheté par sa famille. Tout lui est offert sur un plateau, en somme, elle n’a plus qu’à s’installer, « à en profiter ».

Mais Aline souffre de ne pas avoir le choix. « Je ne sais pas si c’est à cette vie que j’aspire, je n’ose même pas me poser la question, car je sais que, quelle que soit la réponse, ça ne pèse pas dans la balance. C’est mon devoir de rentrer dans l’entreprise, un point c’est tout. »

A la veille du début de son contrat, Aline refuse finalement de prendre ses fonctions, rejette en bloc l’entreprise familiale et par conséquent sa famille, ce qui suscite l’incompréhension générale.

La transmission à une nouvelle génération est un rendez-vous délicat à préparer, et facile à manquer.

Pour la génération en place, l’enjeu est de trouver la juste dose d’intégration à proposer à la nouvelle génération.

L’absence de sollicitation conduit à un déficit d’échanges sur les motivations et les enjeux, et à une perte ou un délitement du lien d’attachement entre la jeune génération et l’entreprise.

L’excès de pression conduit à ce qui est vécu par la nouvelle génération comme une obligation à laquelle il est impossible de se soustraire, et qui empêche de se déployer en tant qu’individu. Cette rigidité ressentie conduit parfois à l’une ou l’autre de deux réactions extrêmes : soit un rejet de l’entreprise familiale (voire de la famille), qui correspond à un désir d’exister, de faire ses preuves ; soit une soumission forte, peu propice à l’épanouissement personnel.

 

Dans les deux cas, le dommage est important : pour la génération en place qui ne parvient pas à transmettre, pour la génération suivante qui se sent incomprise, mais aussi pour l’entreprise dont la pérennité n’est plus assurée ; alors que les valeurs fondamentales sont partagées.

 

Comment trouver le juste équilibre ? Comment montrer à la jeune génération qu’elle est attendue si elle le souhaite, sans l’effrayer ?

Il serait illusoire de penser qu’il existe une solution toute faite, que l’on pourrait appliquer dans toutes les circonstances. L’équilibre doit être flexible, au gré des évolutions du jeune, de sa personnalité, de son environnement, de ses aspirations, mais aussi de sa relation avec l’entreprise.

Il s’agit presque d’un art à perfectionner pour la génération en place, mais aussi pour les générations suivantes : l’art de se comprendre et de s’écouter, même lorsqu’on n’est pas d’accord ; tout en gardant à l’esprit les réalités concrètes de l’entreprise.

C’est à force de tentatives, parfois échouées, que l’on apprend à parler vrai entre générations, à mieux se comprendre, et ainsi moduler les attentes et la façon de les exprimer au fil du temps.

 

 

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